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Ecce Homo

Ce mois-ci, nous vous proposons de lire un extrait du livre Ecce Homo, publié par la Diffusion Rosicrucienne. Il a été écrit par Louis-Claude de Saint-Martin.

PRÉFACE

Louis-Claude de Saint-Martin (1743-1803), dit le Philosophe Inconnu, a écrit ce livre en 1791. Son objet, nous dit Jean-Baptiste-Modeste Gence, était « de montrer à quel degré d’abaissement l’homme infirme est déchu, et de le guérir du penchant au merveilleux d’un ordre inférieur ».

Saint-Martin composa en effet Ecce Homo à l’attention de la duchesse de Bourbon, espérant ainsi la conduire à discerner la spiritualité d’avec la pratique du merveilleux. Bien que vertueuse et empreinte de piété, Bathilde de Bourbon accordait une trop grande foi aux magnétiseurs et aux prophétesses dont elle aimait à s’entourer. Les troubles engendrés par la Révolution et le déclin du christianisme étaient en effet propices aux soi-disant initiés ou prophètes qui abusaient de la crédulité d’un peuple à la dérive, et le millénarisme connaissait un regain d’intérêt en Europe.

Pour le Philosophe Inconnu, si l’homme se laisse facilement abuser par de fausses doctrines, c’est parce qu’il a perdu sa grandeur passée. Ecce Homo ! Voilà l’homme, nous dit-il en peignant les splendeurs dont Adam était revêtu et les misères dans lesquelles il est tombé en écoutant le principe du désordre. Depuis, l’humanité n’a cessé d’errer dans de fausses voies.

Saint-Martin excelle dans le rôle du peintre de la décadence spirituelle de l’humanité. Il dénonce ceux qui se prétendent missionnés pour guider leurs semblables et ne leur proposent en réalité que des chemins sans issue. Cherchant à faire sortir l’homme de ce marasme, il veut lui montrer ce que fut la grandeur du premier homme, créé pour être le témoin et le médiateur entre Dieu et la Création. Pour lui, l’homme étant une pensée de Dieu, il ne peut trouver la félicité qu’en se tournant vers le divin.

Pour démontrer sa thèse, le Philosophe Inconnu a divisé son ouvrage en neuf chapitres. Cette division est choisie à dessein, car dans la symbolique martiniste, ce nombre est associé à la matière. « L’homme, nous dit-il dans nombre de ses ouvrages, s’est égaré en allant de quatre à neuf », c’est-à-dire en passant du monde spirituel au monde sensible.

Se fourvoyant dans le monde matériel, l’homme se trouva dégradé. Cette situation, nous dit Saint-Martin, a eu pour effet d’occulter sa véritable nature. L’homme intérieur, aveuglé, est dorénavant le jouet de forces qui le maintiennent dans la servitude. Dans cette situation, il est incapable de distinguer les vrais prophètes de ceux qui lui promettent des paradis artificiels.

Ce constat étant établi, le Philosophe Inconnu invite l’homme à sortir du sommeil de l’illusion, à se régénérer en ouvrant son cœur à la seule lumière qui puisse rallumer l’étincelle qui repose en lui. Ainsi pourra-t-on proclamer : « Voilà l’homme, voilà le signe, le témoin du principe éternel des êtres, voilà la manifestation vivante de l’universel axiome. »

En 1959, lors de la réédition de cet ouvrage, Paul Derain soulignait combien ce livre écrit en 1791 gardait toute sa valeur : Les mêmes déviations contre lesquelles Louis-Claude de Saint-Martin mettait en garde ses contemporains se perpétuent aujourd’hui. Et il est toujours nécessaire que les hommes soient rappelés à la vraie spiritualité qui est tout intérieure, au seul chemin qui est la voie étroite, au seul Médiateur qui est le divin Réparateur.

Aujourd’hui, Ecce Homo reste une source de réflexion et de méditation pour une humanité en proie à un matérialisme effréné. À une époque où l’illusion, le fantastique et d’autres chimères tendent à prendre la place du spirituel, il nous invite à nous interroger sur la condition humaine, ses joies, ses douleurs et ses espérances.

(…) Fin de l'extrait

 

  1. À titre d’exemple le lecteur pourra comparer le texte de Saint-Martin concernant Jupiter (éd. Migneret 1802 p 106 à 107) avec celui de Boehme aux paragraphes : 76, 81, 78, 82, 110 de L’Aurore Naissante, (traduit de l’Allemand sur l’édition d’Amsterdam de 1682 par le Philosophe Inconnu, Paris imprimerie de Laran et Cie tome second, p 299 à 306).
  2. Le Ministère de l’Homme-Esprit ; Migneret 1802 page IX.